▪ you'd best go to bed now or the trees'll get ya.

"Forests have secrets,' he said gently.
'It's practically what they're for. To hide things.
To separate one world from another."

Ils racontent qu'ils auraient entendu les arbres soupirer, le bourdonnement fluet d'une force primitive qu'ils pouvaient sentir palpiter sous leurs pieds comme le battement d'un cœur frénétique. D'autres relatent le sentiment distinct de percevoir l'océan rugir à l'horizon. Le sel dans l'air, le chant morose des mouettes, l'hurlement des vagues s'abattant sur un rivage hostile. Inconcevable, évidemment, à une centaine de kilomètres de la plage la plus proche - précisément aussi peu plausible que le sable qu'ils ont prétendu avoir retrouvé dans le fond de leurs poches. Et puis, il y a ceux qui ne remarquent rien d'anormal, excepté peut-être le silence sourd et surnaturel qui pèse de tout son poids sur le bois ancestral. Jusqu'à ce qu'ils en émergent des heures, des jours, des semaines plus tard, inconscients du temps qui leur avait filé entre les doigts, loin de s'être doutés qu'ils s'étaient, selon toute logique, évaporés dans la nature. Les témoignages sont innombrables. Ils tachettent périodiquement l'histoire locale comme une moisissure dont on ne peut se débarrasser, vacillent quelque part entre mythes soufflés au coin du feu et la rubrique des faits divers. Entre mise en garde aux enfants indisciplinés et angoisse latente. Tu ferais mieux d'aller au lit, sinon le bois t'avalera tout cru. Certains pensent que la griffe mystique du bois s'étend jusqu'à la zone urbaine qui s'érige à son orée, que sa présence fantomatique se tapit dans tous les coins sombres, se cristallise dans toutes ses failles et toutes ses crevasses. Certains pensent que toute la ville est hantée.